Le temps d’un week-end, le Musée des Arts et Métiers se faisait l’écho de la sobriété numérique. C’est dans ce contexte que j’ai eu le plaisir de participer à une promenade urbaine consacrée aux infrastructures numériques dans le quartier du Marais, sous la conduite de Christelle Gilabert et de Paul Lemaire, organisée par Le Mouton Numérique. Au fil de cette promenade, les ruelles historiques se transformaient en une cartographie vivante des réseaux et des dispositifs technologiques qui jalonnent notre quotidien. En interrogeant la dimension matérielle indispensable à la circulation de l’information, cette balade était un moment d’échange qui nous invitait à prendre conscience que derrière la notion d’Internet, se pose la question de sa centralisation, de sa gouvernance et de l’appropriation matérielle sous-jacente.
Au-delà de son immatérialité apparente, le réseau repose sur des infrastructures physiques, la propriété de câbles transatlantiques redessine les frontières physiques et permettent d’asseoir des rapports de forces géopolitiques, alors même que la quantité croissante de données et de traitements nécessaires soulève des questions environnementales majeures. L’accélération de cette dynamique laisse présager une prolifération de centres de données et de petits réacteurs nucléaires, devenus essentiels pour alimenter des infrastructures toujours plus énergivores. Ce développement, largement influencé par des puissances privées, éloignées du contrôle citoyen, soulève des enjeux cruciaux à l’intersection des luttes technologiques, environnementales et sociales.
C’est dans cette volonté de sensibilisation que débuta cette balade. Partant de la borne Wi-Fi du musée, le parcours nous a menés vers les boîtiers de Point de Branchement Optique Extérieur (PBOE), les points de mutualisation fibre, visibles au détour des rues, avant de longer les gaines vertes dédiées qui se révèlent lors des travaux de voirie.






Parfois, le réseau se dissimule, se dématérialise partiellement via les ondes, propagées par les antennes-relais et les bornes de téléphonie mobile, transformant ainsi l’observation des toits en un véritable jeu de piste.



J’ai ensuite assisté à l’éloge funèbre des innovations perdues, une commémoration singulière orchestrée par Thomas Thibault. Ce moment de recueillement, teinté d’humour, revisitait le destin de produits et services numériques tombés en désuétude, nous invitant ainsi à questionner la notion même de progrès.
Cette cérémonie faisait suite à un atelier ludique où les participants avaient été invités à démonter divers objets électroniques, sans obligation de les remonter, afin de mieux saisir la complexité de leurs composants, observer l’enchevêtrement des matériaux et prendre conscience de leur impact environnemental. Il nous est nécessaire de prendre la mesure des paradoxes de notre monde. Nous utilisons les machines les plus imposantes jamais conçues par l’humanité pour l’extraction minière, dont la finalité est de produire les éléments physiques les plus infimes.




J’espère que ce court aperçu éveillera votre curiosité et vous incitera à découvrir par vous-même les initiatives du Mouton Numérique…